3 questions à… 3 ambassadrices du savoir-faire français

En cette journée du 8 mars, portraits croisés de 3 femmes d’exception à la tête de 3 entreprises d’excellence françaises.
Rencontre avec Catherine Troubat, dirigeante des Anis de Flavigny,  formée près de 10 ans par son père avant reprendre les ficelles de l’entreprise familiale, Emmanuelle Benoit, directrice de la Cité de la Chaussure, un lieu unique de valorisation d’une filière locale et Claire Bauby, 3ème génération de céramiste à la tête de l’atelier des Céramiques Sant Vicens !

Bonjour à vous 3 et merci pour votre participation ! Pouvez-vous revenir sur votre parcours ? Comment êtes-vous arrivée à la tête de votre entreprise ?

Catherine Troubat : La fabrique d’Anis est située au cœur de l’ancienne abbaye. Tandis que Papa travaillait en bas, au rez-de-chaussée à fabriquer les Anis, Maman et nous les enfants vivions à l’étage. On peut dire « que je suis tombée dans la bassine d’Anis depuis que je suis petite ». Après des études de marketing et de communication, j’ai travaillé quelques années dans la publicité.

Néanmoins, je suis revenue à mes racines, travailler aux côtés de mon père, Nicolas,  afin de reprendre progressivement l’entreprise. Je lui ai demandé de m’accompagner le plus possible, et c’est pendant 10 ans que j’ai eu le plaisir d’apprendre, et de travailler avec mon père et toute l’équipe de la fabrique qui m’a également formée.

Emmanuelle Benoit : Diplômée d’une école de Commerce, j’ai d’abord travaillé dans le marketing industriel avant d’arriver au sein du Groupe Archer en 2010, l’année du lancement de l’atelier chaussures. C’était un pari fou d’être les premiers à rouvrir un atelier de fabrication de chaussures après la crise massive qu’avait connue notre ville. Un pari fou, mais ô combien passionnant :  reconstruire la filière à Romans, développer un écosystème autour de la chaussure, sauvegarder les savoir-faire, créer des emplois et conserver les machines sur Romans.

C’est tout naturellement, au fil des mois et des années, que j’ai pu faire mes armes et que je me suis investie sur cette nouvelle activité du Groupe. A la fois sur la commercialisation de nos chaussures, la communication, mais aussi (déjà) les visites de notre atelier. Quand nous avons commencé en 2017 à rêver de la Cité de la Chaussure, j’ai participé activement au projet et en ai pris la responsabilité dès l’ouverture en 2019. C’était une immense fierté personnelle, mais aussi et surtout collective.

Claire Bauby : J’ai grandi à Sant Vicens. Dans mes premiers souvenirs, lors de ma petite enfance, je suis aux côtés de mon grand-père et mon grand-oncle, puis avec mon père en train de travailler à l’atelier de céramique, et ma mère à la gestion et à la vente. Dès mon plus jeune âge, j’ai su que l’atelier est une histoire de famille. Dès l’école, je passais la plupart du temps avec eux dans l’entreprise, parfois à l’atelier, parfois à la boutique. J’ai toujours aimé ces deux aspects du métier, ils font partie de mon ADN. 

A la fin de mes études, j’ai approché d’autres univers, puis je suis revenue à Sant Vicens où personne ne m’attendait. A mon retour, j’ai décidé de créer ma propre collection. Je savais émailler, car j’avais appris à émailler les pièces fabriquées par mon père, mais là, il fallait que je réinvente tout pour trouver mes gammes et dans la lignée du savoir-faire de l’entreprise… Ce n’est qu’au bout de 5 ans, quand mon père a vu que j’avais persévéré qu’il m’a transmis les ficelles et les petits secrets de l’atelier.

Qu’est-ce qui vous passionne le plus dans votre métier ?

Catherine Troubat : Chaque matin, j’ai la joie de voir l’atelier prendre vie, chaque artisan arrive, prend sa place, et démarre le merveilleux travail d’équipe. Personnellement, mon métier n’est pas centré sur le management mais sur la passion du savoir-faire, la passion des anis, je pense que c’est ça qui est important pour guider la fabrique. Pouvoir participer à la transformation de chaque gramme de sucre en un bonbon gourmand, délicatement dragéifié, pendant 15 jours, avec des arômes naturels, qui fera le tour du monde, c’est une expérience gratifiante.

Selon moi, j’apporte une plus-value pour l’équipe grâce à ma créativité, sur les parfums, les illustrations, les packaging, les circuits de distribution mais également, sur l’aspect valorisation touristique aux côté de Vanesse, plus précisément sur la création du musée et les améliorations à apporter sur la mise en valeur. Je m’attèle également peu à peu à la fabrication d’outils d’aide au travail (ergonomie des postes de travail, investissements dans des machines….) et sur la stratégie commerciale.

Emmanuelle Benoit : La diversité est un mot clé dans mon parcours professionnel et également aujourd’hui à la Cité de la Chaussure. Ce lieu emblématique dédié au renouveau de la chaussure à Romans possède de multiples facettes qu’il faut animer au quotidien. A la fois la vente dans notre boutique, les relations avec les ateliers de production, l’organisation des visites de nos ateliers, mais aussi les coopérations avec nos partenaires du tourisme, les institutionnels ou bien encore des créateurs.

C’est parfois un jeu d’équilibriste, mais j’ai la chance d’avoir autour de moi une équipe restreinte, mais formidable, tous sont mobilisés à 100% et contribuent activement à la réussite de la Cité. C’est encourageant de voir la façon dont nous évoluons et avançons ensemble. Nous avons un rêve commun que nous partageons : faire de la Cité de la Chaussure un lieu incontournable dans la fabrication et la vente de chaussures françaises de qualité et un acteur incontournable de la visite d’entreprise. Et ça, c’est vraiment formidable.

Claire Bauby : La création, au sens large. Cela va de la forme, aux matériaux en passant par les couleurs… La céramique offre tellement de possibilités, le champ des possibles est quasi infini,  il n’y a pas de lassitude en la pratiquant. Pour exemple, mon père, qui a près de 80 ans cette année, est toujours présent et actif à l’atelier. Il continue de laisser sa créativité s’exprimer, il continue de créer ce qui passe aussi par de nombreux essais.

En créant, c’est votre état d’esprit du moment qui s’exprime au gré des moments plus sombres ou plus joyeux de la vie. Dans certains cas, il faut savoir rester sur des créations simples. Dans les moments plus lumineux, là, c’est une exploration permanente : la forme, le dessin, les couleurs. Le moment le plus magique reste l’ouverture du four.  C’est toujours une surprise, et c’est un moment que je partage souvent avec ma mère ou avec mes fils.

Votre entreprise ouvre ses portes aux visiteurs. En quoi la visite est-elle stratégique dans le développement de votre entreprise ?

Emmanuelle Benoit : Dès 2010, quand nous avons ouvert notre atelier de fabrication de chaussures, cela a suscité beaucoup d’intérêt. C’est donc tout naturellement que nous avons au départ, ouvert les portes de notre entreprise pour partager avec nos visiteurs nos savoir-faire et notre façon d’entreprendre.  Au fil des années, les visiteurs ont été de plus en plus nombreux, conquis par ces visites « apprenantes », alors que nous étions encore installés en zone industrielle et dans des locaux peu adaptés à la visite.

En 2019, quand nous avons ouvert la Cité de la Chaussure, la visite d’entreprise était dès l’ouverture l’un des trois axes fondamentaux du projet. Dès le départ, nous avons fait le choix d’avoir une « guide » à temps plein qui fait visiter nos ateliers. En 2023, ce sont 25 000 visiteurs qui ont franchi les portes de la Cité de la Chaussure. Des visites pour les groupes ou les individuels sont organisées quasi quotidiennement, notamment en partenariat avec Entreprise et Découverte, l’office du tourisme ou bien d’autres sites touristiques locaux. Ces visites sont essentielles dans notre aventure ; elles permettent à nos visiteurs de mieux comprendre les enjeux de la fabrication de chaussures en France.

Claire Bauby  : Nous avons ouvert les portes d’atelier en 2018, suite à une forte demande de la clientèle. Nous avons conçu une visite guidée pour plonger les visiteurs dans notre univers. Pour débuter la visite, j’ai créé un espace historique qui retrace une partie de nos 82 ans, avec le passage de très artistes tels que  Jean Lurçat, Jean Picart Le Doux, Salvador Dali, Pablo Picasso, et beaucoup d’autres. Ensuite, j’amène les visiteurs à l’atelier, où je fais des démonstrations de notre savoir-faire.

Nous sommes au contact direct des visiteurs, ils sont transportés dans mon histoire familiale. Chaque visiteur trouve un lien avec son histoire personnelle. Nous sommes tous des transmetteurs.  La visite permet de faire découvrir et fidéliser les visiteurs, ils reviennent pour faire un achat qui a du sens. Même pour les collectionneurs la visite est un enjeu, ils se déplacent pour revenir et découvrir nos pièces uniques. D’autant plus grâce à la reconnaissance que l’atelier a gagné au fil des années et les artistes passés par l’atelier. Nous sommes devenus comme un refuge, une valeur sûre.

Catherine Troubat : Ouvrir nos portes c’est accueillir nos consommateurs, nous les écoutons, nous prenons en compte leurs attentes. Les visiteurs ont beaucoup à nous apporter, leurs retours sur la visite et leurs questions nous oriente dans notre travail.

D’autre part, les équipes se joignent à moi pour affirmer que c’est un plaisir de voir petits et grands si heureux de découvrir notre fabrique d’Anis ! Nos visiteurs sont nos premiers ambassadeurs !

> Découvrir la visite des Anis de Flavigny ici. Les Anis de Flavigny sont membres du réseau Vive la Bourgogne-Franche-Comté, et labellisés Entreprise du Patrimoine Vivant.

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